Mes chers Jeunes compatriotes, je suis Maurice KAMTO, militant politique et par ailleurs Président national du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun. A l’occasion de la fête de la Jeunesse, devenue un rendez-vous républicain, je vous adresse cette année, non pas un discours de circonstance, mais une invitation à rejoindre la table de discussion: discussion sur votre devenir en tant que catégorie particulière de notre population; discussion sur le devenir de notre pays, le Cameroun.
D’emblée, nous pouvons faire ensemble le constat des dégâts causés au cours des dernières décennies à notre cher et beau pays. Je m’adresse à vous au moment où l’atteinte à la sécurité de notre pays par la secte obscurantiste Boko Haram continue à faire de nombreuses victimes même si nos héroïques forces de défense leur ont infligé des coups mortels; au moment où la paix n’est pas totalement revenue dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest en dépit de quelque accalmie; où la famine menace la survie des populations dans la partie septentrionale du pays à la fois à cause de la sécheresse et de la politique d’abandon de ces régions dans la misère par notre Gouvernement; où le travail n’est plus le gage d’une ascension sociale méritée; où la situation économique générale du pays s’est dégradée sévèrement avec des répercussions sociales que l’on ressentira durement au cours de cette année; où face à cette situation, des dirigeants irresponsables se moquent de votre intelligence avec des jouets-ordinateurs qui coûtent une fortune aux finances publiques et compromettent votre avenir par l’aggravation de l’endettement de l’État que vous serez obligés de rembourser demain; et où l’on ouvre en pleine année académique des institutions publiques d’enseignement supérieur, sans locaux appropriés ni enseignants qualifiés en nombre suffisant, non pour exécuter un plan de l’enseignement supérieur, mais dans le cadre d’une opération purement électoraliste. Après l’échec piteux de l’opération « don d’ordinateurs », le Président sortant espère relancer sa campagne électorale par de tels actes politiciens dont les conséquences seront désastreuses sur la qualité de la formation des jeunes. C’est faire injure à votre intelligence de croire que vous n’avez pas compris le but de la manœuvre.
Depuis son indépendance et même longtemps après, le Cameroun a été la plaque tournante et le moteur économique de l’Afrique Centrale. Son rayonnement était établi dans divers domaines, notamment ceux de l’éducation, du sport, de la musique. La richesse de son patrimoine naturel et son pluralisme ethnique et culturel lui ont valu d’être appelé l’Afrique en miniature. Le Cameroun, c’est tout un continent dans un seul pays. Le Projet de la Renaissance Nationale (PRN) que le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) porte, met la jeunesse au centre de ses préoccupations. Cela est vérifiable dans la Vision du Cameroun que nous avons adoptée dès la naissance du MRC en 2012. Il s’agit d’une offre spécifique et cohérente pour combattre le chômage des jeunes qui est un véritable cancer social, et pour les préparer à relever le défi de la modernisation du pays dans un monde global, marqué par la rapidité des changements et une compétition impitoyable.
Le projet que notre parti propose à la jeunesse, est dénommé PACTE JEUNE. Il consiste en un trépied dont le pilier central est l’EDUCATION, le deuxième pilier la FORMATION et le troisième pilier la RECHERCHE-INNOVATION.
Sur le pilier éducatif, je n’ai cessé de dire depuis plusieurs années que notre système éducatif doit faire l’objet d’un changement radical par la mise en place d’un nouveau modèle. Le système éducatif actuel a fait son temps. Il avait été conçu principalement pour former un personnel d’administration du jeune État du Cameroun et la substitution des Camerounais aux cadres expatriés qui contrôlaient alors tous les principaux secteurs d’activité du pays. Ce système éducatif a donné tout ce qu’il avait à donner. Il est désormais dépassé. Il doit donc être changé, de la maternelle à l’enseignement supérieur par un système qui éveille chez l’enfant le sens de la découverte des choses de son environnement dès la maternelle, offre aux jeunes des lycées et collèges de se familiariser avec le monde professionnel parallèlement à leurs études, et aux jeunes universitaires d’explorer le monde de la recherche et de l’innovation. Une cérémonie nationale de l’EXCELLENCE ACADÉMIQUE ET SCIENTIFIQUE sera organisée chaque année pour distinguer les meilleurs de notre système éducatif.
Le pilier formation entend offrir à tout jeune, diplômé et non diplômé, une chance d’avoir un métier qui lui assure un emploi décent, grâce à des formations sur mesure dans des Centres de formation professionnelle et les centres de métiers. Il s’agit pour celui qui est nanti d’un diplôme et qui ne trouve pas d’emploi ou qui voudrait changer de métier, de suivre une formation à un métier précis pour une durée pouvant aller de trois à 24 mois au maximum, afin de changer le couloir initial dans lequel l’a placé son diplôme initial pour un nouveau couloir de spécialisation qui lui garantit un métier. Pour un jeune non diplômé, il s’agira de faire l’apprentissage d’un métier en rapport avec ses aptitudes par le compagnonnage d’anciens expérimentés intervenant dans des Centres des métiers. Ainsi, par exemple, le jeune qui aura quitté trop tôt le système scolaire pourra-t-il faire dans ces Centres respectivement l’apprentissage d’un métier comme celui de coiffeur ou celui de menuiser, de fromagère ou de sculpteur-décorateur bref des métiers de l’agriculture ou de l’artisanat. Les Centres de formations professionnelles et les Centres des métiers serviront ainsi de passerelles d’un couloir de formation à un autre et d’un métier à un autre. Des PRIX DES MEILLEURS APPRENTIS seront décernés annuellement.
Le pilier recherche-innovation permettra aux jeunes sortant en particulier des filières scientifiques et techniques, de bénéficier de tout l’encadrement institutionnel et financier nécessaire à la mise au point des produits de leur intelligence. Ils trouveront auprès des pouvoirs publics l’écoute, l’encadrement et l’accompagnement dont ils auront besoin pour la mise au point des prototypes de leurs inventions et la facilitation de la mise en relation avec le monde industriel et les milieux d’affaires. Notre projet est de signer demain des conventions de projets avec chaque structure publique de recherche ou de formation technique pour la mise au point d’un produit précis dans un délai déterminé. Ne recevront le soutien du financement public que celles de ces structures qui auront atteint les objectifs conventionnels. Des PRIX NATIONAUX DE L’INNOVATION DOTÉSDE SOMMES IMPORTANTES seront décernés chaque année.
Pour les métiers artistiques, des structures appropriées telles que les écoles de musiques et de la danse seront mises en place au moins dans le cadre des Complexes artistiques qui seront établis au niveau de chaque chef-lieu de région, l’ensemble devant être couronné par une Académie nationales des arts.
L’État ne pouvant à lui seul résoudre les problèmes d’employabilité, il faut compter sur l’émergence d’une nouvelle classe entrepreneuriale qui servira de locomotive pour la création d’emplois dans divers secteurs d’activité.
Nous avons un idéal devant nous: le panafricanisme. Mais j’ai à cet égard une approche pragmatique pour sa réalisation. Sans attendre sa mise en œuvre au niveau continental, ce qui peut prendre encore un certain temps. Je vous invite à la réalisation sans tarder des États-Unis d’Afrique Centrale rêvés par Barthélemy BOGANDA de Centrafrique. Je vous appelle à lancer dès que possible le mouvement Jeunesse Fédéraliste d’Afrique Centrale.
Mon intérêt pour les jeunes et leurs problèmes ne date pas d’aujourd’hui, parce qu’il ne relève pas d’un calcul politicien. C’est l’expression de ma conscience aiguë de ce que la jeunesse est la tranche de vie où chaque personne peut apporter le plus à lui-même et à la Nation. C’est la période où le rendement de chacun est plus élevé. C’est ainsi que notre pays, terre richement dotée par la nature et l’histoire, a vu s’épanouir, au fil du temps et à différentes périodes, des jeunes aux talents exceptionnels, fiers ambassadeurs du Cameroun dans presque tous les domaines.
Je paraîtrai sans doute arbitraire, incomplet assurément; mais il me faut citer dans ces différents domaines quelques noms pour illustrer cette richesse prodigieuse qui vaut à notre pays tant d’admiration sur la scène internationale:
– le domaine intellectuel avec des références comme le penseur Achille MBEMBE, les romancières Calixte BEYALA, Leonora MIANO et IMBOLO MBUE, le romancier Patrice NGANANG, l’économiste et écrivain Célestin MONGA,
– le domaine scientifique, technique et de l’innovation, je suis avec une attention toute particulière des jeunes pleins de promesse comme Olivier MADIBA pour la première société de création de jeu vidéo et son premier jeu de rôle «AURION», Arthur ZANG pour son Cardiopad, Alain NTEFF pour la « Gifted Mom », Churchill NANJE pour « Njorku », qui révolutionne la recherche d’emploi, et le collectif de la Silicon Mountain qui constitue une véritable pépinière de talents pour l’essor de l’économie numérique au Cameroun.
– le domaine culturel et artistique, l’étendard du Cameroun, est portée aux nues par des personnalités d’exception comme le musicien Richard BONA, le commissaire d’exposition, écrivain et critique d’art Simon NJAMI, le poète Paul DAKEYO, le cinéaste Jean Pierre BEKOLO, les plasticiens TOGOU et TAYOU, la chanteuse-danseuse-dramaturge WERE WERE LIKING dont le talent éclabousse le théâtre-opéra africain depuis des décennies; les chanteuses et chanteurs Charlotte DIPANDA, Kareyce FOTSO, LOCKO, Mister LEO, DAPHNE, MAGASCO, TENOR; je ne peux que mentionner Jules TEUKAM, le premier compositeur d’Opéra et de musique savante camerounais et probablement d’Afrique subsaharienne; Greg BELOBO l’un des rares chanteurs d’opéra africains.
– le domaine sportif avec des figures emblématiques comme Ambassadeur itinérant Albert Roger MILLA, TSEBO dit « L’homme de Khartoum », Thomas NKONO, Joseph Antoine BELL, Stephen TATAW, Patrick MBOMA, Gérémi Sorel FOTSO NJITAP, François OMAM BIYIK, Rigobert SONG BAHANAG dit «MANYANG », Victor NDIP AKEM, Samuel ETO’O Fils, Vincent ABOUBAKAR, l’athlète Françoise MBANGO et j’en passe.
Je ne puis oublier le talent de nos jeunes designers qui ne cessent de nous étonner de par leur créativité; je mentionnerai notamment, les créations FK, MARYEL COUTURE, FRENCH KIND, JASAÏD, HEART BEAT, SANJA, ISRAËL B, et profite pour saluer tous ceux d’entre vous que je n’ai pas cités par contrainte de temps.
Dans cet ordre d’idées, je tiens également à saluer les jeunes buyam sellams, ceux des mototaxis, les vendeurs à la sauvette communément appelés «sauveteurs», qui malgré le contexte difficile, parviennent à s’organiser pour apporter des couleurs à notre économie en fournissant aux couches défavorisées de la population des denrées alimentaires et des vêtements, des moyens de transport qui permettent de surmonter l’état chaotique de nos routes. Je n’oublie pas que vous constituez le secteur dit « informel » qui pèse plus de 80% du PIB de notre pays. Je sais que vous n’avez pas toujours choisi ces couloirs, comme vous les appelez vous-mêmes. Vous y êtes en général contraints, faute de mieux, par instinct de survie, par refus de tomber dans le laisser-aller et la facilité, par désir d’autonomie aussi. Je sais combien de fois vos efforts sont ruinés par des saisies et des descentes musclées; je sais comment vous êtes violemment déguerpis de vos comptoirs sans promesse de relocalisation et que les promesses qui sont souvent faites dans ce sens ne sont jamais tenues; je connais les vexations, la maltraitance des plus jeunes et des enfants sans défense.
J’ai une pensée particulière pour les jeunes qui, excédés, remettent en question leur nationalité camerounaise, ou vont jusqu’à penser à la sécession; je parle de ceux-là qui faute de repères, se font enrôler par des groupes terroristes; je parle de ces milliers de jeunes qui, tout espoir perdu, prennent le risque de défier les organisations mafieuses libyennes pour, s’ils s’en sortent, aller affronter la mer parce qu’ils rêvent d’un avenir meilleur en occident. La jeunesse camerounaise est l’héritière principale de notre pays. Elle doit prendre conscience de ses responsabilités et de son rôle irremplaçable. Personne n’a le droit de vous arracher cet héritage et ce rôle dont vous devez être fiers. Personne n’a le droit de vous faire douter de vous, d’éteindre vos rêves d’avenir, de faire de vous des orphelins du progrès dans un monde où tout est devenu possible avec les possibilités illimitées qu’offrent les technologies modernes. Le Cameroun n’appartient pas à une catégorie de jeunes, notre pays appartient à tous ses enfants, à tous les Camerounais.
Même le domaine politique permet de vérifier le rôle exceptionnel des jeunes Camerounais dans la construction d’un État moderne et d’une nation qui se forge progressivement. Je rappelle à cet égard:
– qu’Amadou Ahidjo n’avait que 34 ans en 1958 lorsqu’il accéda aux fonctions de Premier Ministre du Territoire du Cameroun sous administration française, et 36ans lorsqu’il devint le tout premier Président de la République du Cameroun;
– que John Ngu Foncha et Ngom Jua n’avaient que 43 et 40 ans respectivement lorsqu’ils devinrent l’un après l’autre Premier Ministre du Cameroun occidental;
– que M. Paul BIYA avait seulement 35 ans lorsqu’il fut nommé Premier Ministre de la République Unie du Cameroun en 1975 et 49 ans lorsqu’il devint Président de la République en 1982.
Et comment oublier que les nationalistes qui, en se dressant contre le pouvoir colonial, rendirent possible l’indépendance de notre pays dès le 1er janvier 1960, avaient tous moins de 40 ans lorsqu’ils engagèrent leur lutte héroïque? UM NYOBE, qui devint le Secrétaire Général de l’UPC à 35 ans, meurt assassiné à l’âge de 45 ans; Félix Roland MOUMIE empoisonné à 35 ans; Castor OSSENDE AFANA assassiné à 36 ans; Ernest OUANDIE, qui était le Vice-président de l’UPC à seulement 28 ans, est exécuté sur la place publique à 53 ans, après avoir fait don de sa jeunesse au peuple camerounais.
Si je rappelle ces figures emblématiques impérissables, c’est pour vous dire que vous ne pouvez pas vous permettre d’être des spectateurs de vos vies et de votre avenir, ni différer votre engagement citoyen par une indifférence qui serait coûteuse demain. Même si vous n’êtes pas militant d’un parti politique, même si vous n’avez pas envie de militer dans un parti politique, engagez-vous dans l’action citoyenne d’inscription sur les listes électorales. Allez voter quand viendra le moment et assurez-vous que personne ne changera votre choix démocratique des personnes que vous voulez voir diriger notre pays. Votre avenir en dépend!
Le PACTE JEUNE que je vous propose dans le cadre du Projet de la Renaissance Nationale est, je l’espère, alléchant. Mais il demeurera de simples idées s’il ne faisait pas l’objet d’une appropriation volontariste par chacun de vous, dans le cadre d’une prise de conscience nouvelle des enjeux et des défis qui sont ceux du monde d’aujourd’hui et plus encore celui de demain, c’est-à-dire votre monde. C’est pourquoi je vous réitère mon invitation, à la table de discussion, car la modernisation du pays devra être l’expression de vos aspirations et de notre choix collectif. Je ne demande qu’à vous écouter; je ne demande qu’à composer avec vous.
Chers jeunes du Cameroun, depuis longtemps on vous appelle le « fer de lance de la Nation ». Le moment est venu de donner forme au fer afin qu’il ne soit pas un fer à la pointe cassée, incapable de frapper sa cible. Le pays est à la croisée des chemins. Les choix à venir seront décisifs pour le futur de notre pays. Vous pouvez me faire confiance pour mener ces batailles avec détermination. Quant à moi, je compte sur vous.
C’est sur cette note de confiance que je souhaite à chacun et chacune d’entre vous une bonne fête de la jeunesse.
Vive la jeunesse du Cameroun;
Vive le Cameroun.